COVID-19 : la grande diversité de la quantité d’anticorps produits par les volontaires de Constances

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Entre mai et octobre 2021, plus de 6 000 volontaires de Constances ont donné leur sang afin d’y rechercher des anticorps contre la COVID-19. Résultats ? La quantité d’anticorps produite contre la protéine Spike présente à la surface du virus est très variable en fonction de l’âge, du sexe, de la rencontre avec le virus et du statut vaccinal des participants.

Une étude menée grâce à la participation entre mai et octobre 2021 de 6 000 volontaires de Constances, 4 200 personnes de l’étude Nutrinet-Santé et 3 700 participants de l’étude familiale E3N-E4N apporte un regard au niveau « populationnel » sur la quantité d’anticorps produite contre la protéine Spike située à la surface du virus responsable de la COVID-19. Trois questions à Fabrice Carrat, médecin à l’hôpital Saint-Antoine, épidémiologiste Inserm à l’Institut Pierre Louis d’Epidémiologie et de Santé Publique, et coordinateur de l’étude réalisée dans le cadre du projet SAPRIS-SERO.

Vous avez trouvé la plus faible quantité d’anticorps chez les personnes non vaccinées et non infectées, et la plus forte chez les personnes infectées et vaccinées. Cela semble logique. Comment expliquez-vous, par contre, la quantité plus forte d’anticorps chez les personnes vaccinées et non infectées que chez les personnes infectées et non vaccinées ?

Fabrice Carrat : Face à un virus, le système immunitaire déclenche une réponse très diversifiée. La production d’anticorps par les cellules B (ou lymphocytes B) fait partie de cette réponse. Ces anticorps sont libérés dans le sang, mais aussi dans le nez – on parle alors d’anticorps sécrétoires. Il existe aussi une réponse innée dans laquelle interviennent notamment des cellules tueuses comme les lymphocytes NK. Avec le vaccin, administré en intramusculaire, on stimule principalement la production d’anticorps dans le sang. Dans le cas d’une infection, le virus arrive par le nez et la stimulation de l’immunité dans le compartiment sanguin est, de ce fait, moins directe. En revanche, le virus stimule mieux l’immunité « locale » dans le système respiratoire. Avec le test ELISA réalisé dans notre étude, on a donc une vision très limitée de la réponse immunitaire face au virus de la COVID-19 car on a recherché uniquement les anticorps dans le sang et des anticorps bien spécifiques, c’est-à-dire ceux contre le domaine S1 de la protéine Spike. On ignore les anticorps sécrétoires, les autres anticorps mais aussi toute l’immunité innée.

Représentation simplifiée de la quantité d’anticorps contre le domaine S1 de la protéine Spike mesurée dans les échantillons de sang auto-prélevés entre mai et octobre 2021 de 14 000 participants de l’étude SAPRIS-SERO.

Vous trouvez deux relations très différentes en fonction de l’âge avec une quantité d’anticorps contre la protéine Spike qui diminue avec l’âge dans le cas d’une vaccination et qui augmente dans le cas d’une infection.

Fabrice Carrat : Nous avions déjà observé une plus grande quantité d’anticorps chez les personnes âgées sur les auto-prélèvements sanguins de 2020, dans le cas du projet SAPRIS-SERO. Et ce, pour les 3 types d’anticorps que nous avions alors recherchés : anticorps contre la nucléocapside, contre la protéine Spike et anticorps neutralisants. Les quantités d’anticorps étaient plus élevées lorsque les personnes étaient plus fortement malades et chez les sujets plus âgés. Chez les personnes vaccinées et non infectées, on a une réponse inverse avec l’âge, et ce résultat se retrouve avec de nombreux vaccins : plus on est âgé, moins forte est la réponse en anticorps. Ces deux observations soulignent qu’infection et vaccination enclenchent des réponses et mécanismes immunitaires très différents en fonction de l’âge. A noter que nous avons aussi trouvé que les femmes avaient en moyenne 20 à 30 % plus d’anticorps que les hommes que ce soit en cas d’une vaccination ou d’une infection. Cela a déjà été décrit dans d’autres études, avec des hypothèses explicatives d’ordre génétiques liées au sexe et hormonales. Nous avons encore beaucoup de choses à apprendre sur le fonctionnement de notre système immunitaire.

Représentation simplifiée de la quantité d’anticorps en fonction de l’âge des participants.

Avez-vous trouvé des différences selon les vaccins administrés aux participants ?

Fabrice Carrat : Nous avons trouvé des niveaux très différents. La quantité d’anticorps est la plus faible chez les personnes ayant reçu 2 doses du vaccin AstraZeneca (un vaccin à adénovirus). Les personnes ayant reçu 2 doses de Moderna ont des quantités plus grande que les personnes ayant reçu 2 doses de Pfizer — ce qui est logique car la quantité d’ARNm est 3 fois plus forte dans une dose de Moderna qu’une dose de Pfizer. Ce qui est intéressant dans nos résultats, c’est que nous trouvons que les personnes ayant d’abord été vaccinées avec un AstraZeneca puis avec un vaccin à ARNm — que ce soit Moderna ou Pfizer — ont un très fort taux d’anticorps. Quand on administre 2 vaccins de type différents, on élargit les réponses car on a 2 façons de stimuler le système immunitaire.

Représentation simplifiée de la quantité d’anticorps en fonction des vaccins administrés aux participants.

 

 

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