Des cancers derrière la pollution de l’air ?

Depuis 2013, la pollution de l’air est reconnue comme facteur avéré du cancer du poumon. Qu’en est-il pour les autres cancers ? Un projet va s’appuyer sur la cohorte Constances pour apporter des réponses d’une précision inédite.

Circulation alternée lors des pics de pollution, mesures fiscales anti-diesel, interdiction des feux de cheminée en Ile-de-France… Les plans pour limiter les émissions de gaz et de particules fines dans l’atmosphère sont de plus en plus nombreux. En cause ? Leurs implications dans de nombreuses maladies respiratoires et cardiovasculaires, mais aussi dans le cancer du poumon. Qu’en est-il pour les cancers du sein, de la prostate, de la vessie… ? Comme le tabac, la pollution atmosphérique ne serait-elle pas un cancérigène plus « généraliste » ?

Afin d’y voir clair dans cet écran de fumée, des équipes de Constances ont reçu le feu vert -et un financement de 5 ans de la part de la Fondation ARC pour la recherche contre le cancer– pour lancer le projet OCAPOL (Observatoire longitudinal des effets sur le cancer de l’exposition chronique à la pollution de l’air extérieur). Il mobilisera des chercheurs et ingénieurs de l’équipe Constances, de l’Institut de veille sanitaire de l’Inserm en France, mais aussi au Canada et en Suisse. La tâche s’annonce coriace.

Pour chaque volontaire de Constances, mais aussi de la cohorte Gazel intégrée dans le projet, les chercheurs « mettront en face » de leur lieu de résidence une exposition à la pollution de l’air extérieur. Et pas question de rester « grossier », de se limiter à une triviale dichotomie campagne/ville ou de regrouper sous un même chapeau des parisiens habitant près du périphérique à d’autres avec vue sur le parc des Buttes-Chaumont. Non, l’idée est d’associer à chaque volontaire, l’exposition la plus réaliste possible ! Afin d’y parvenir, les chercheurs vont solliciter 2 modèles spatiaux de pollution. D’une grande complexité, ces modèles intègrent mesures in situ et observations satellites, conditions météorologiques et de trafic routier.

Autre défi : remonter le temps. Les processus cellulaires aboutissant aux tumeurs cancéreuses se mettent généralement en place 10-15 ans avant le diagnostic de la maladie. Or les déménagements sont parfois courants, notamment chez les plus jeunes. En 2017, chaque volontaire Constances recevra un questionnaire numérique afin de préciser, de manière confidentielle, ses adresses de résidence successives. Les chercheurs pourront ainsi calculer une exposition à la pollution de l’air cumulée sur plusieurs années.

Force supplémentaire du projet : la prise en compte de l’exposition professionnelle des volontaires. Via leurs métiers, certaines personnes sont confrontées de quasi ininterrompue aux polluants de l’air extérieur : conducteurs routiers, agents de la circulation, employés de station-service… D’autres manipulent des produits chimiques aux effets cancérigènes reconnus comme les fibres d’amiante, le benzène ou le cadmium.

« Aucune étude antérieure n’a pris ce facteur de confusion en compte » souligne Marcel Goldberg qui dirige le projet Ocapol. Et d’ajouter enthousiaste : « Constances sera l’une des sources majeures d’information au niveau mondial des effets de la pollution de l’air extérieur sur les cancers. Ocapol a pour vocation a de devenir un dispositif d’observation pérenne qui va grandir avec Constances et les progrès dans les méthodes de modélisation de la pollution. Il nous permettra d’étudier les effets de la pollution de l’air sur bien d’autres types de pathologies que les cancers ». Ocapol, un projet qui n’est pas prêt de partir en fumée.

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