
Le poids des douleurs articulaires parmi les actifs de Constances
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Au sein de Constances, 50 % des femmes et 42 % des hommes en activité rapportent des douleurs persistantes aux articulations évoquant des troubles musculo-squelettiques. Pourquoi tant de souffrance ? Pourquoi cette inégalité de genre ?
Au cours d’une journée de travail, devez-vous vous agenouiller ou vous accroupir ? Durant combien de temps devez-vous « tordre le poignet » ? Utilisez-vous des outils vibrants ? Portez-vous une charge qui pèse plus de 25 kg ? Ces 4 questions sont tirées du questionnaire « expositions professionnelles » auxquel ont répondu 19 197 volontaires de Constances âgés de 30 à 69 ans, et en activité en 2013. Qu’en est-il ressorti ?
« Comme attendu, nous trouvons un fort gradient de la fréquence d’exposition aux contraintes posturales selon les professions et catégories socio-professionnelles : les cadres sont moins exposés que les salariés des professions intermédiaires, eux-mêmes moins exposés que les employés et les ouvriers » indique Alexis Descatha, médecin à l’Assistance Publique – Hôpitaux de Paris et chercheur à l’Université Versailles Saint-Quentin.
Autre résultat, aussi attendu : les hommes sont davantage soumis que les femmes à des contraintes « bio-mécaniques » durant leurs journées de travail – excepté pour la position agenouillée. Mais alors, comment expliquer que les travailleuses de Constances rapportent davantage de douleurs articulaires que les travailleurs ?

« L’origine de cette différence est sans doute multiple. Elle peut être liée au fait que les femmes sont davantage soumises à des contraintes organisationnelles (travail sous contrainte de temps, temps de récupération insuffisant…) et psychosociales (faible latitude décisionnelle, manque de soutien de la hiérarchie, d’entraide entre collègues…) qui peuvent aussi engendrer, directement ou indirectement, des douleurs articulaires. Deux enquêtes du ministère du Travail ont montré que les ouvriers et les employés sont davantage exposés aux contraintes biomécaniques, organisationnelles et psychosociales. Or au sein de Constances, près 47 % des femmes sont « ouvrières ou employées » contre 37 % des hommes » souligne Yves Roquelaure, professeur de médecine du travail au Centre hospitalier universitaire d’Angers qui mène des recherches sur les troubles musculo-squelettiques depuis plus de 25 ans. D’ailleurs, avec son équipe associée à l’ Institut de veille sanitaire (InVS), il avait déjà mis à jour une inégalité homme/femme face aux douleurs musculo-squelettiques parmi la population salariée des Pays de la Loire : 35 % des femmes et 27 % des hommes en activité souffraient de douleurs articulaires, avérées cliniquement, pour près de la moitié d’entre eux, comme trouble musculo-squelettique par leur médecin du travail.
« Cette différence de genre peut aussi résulter de postes de travail et d’outils conçus pour les hommes et mal adaptés à la morphologie et à la force des femmes, de facteurs de susceptibilité individuelle plus fréquents (ménopause, …). Enfin, ce n’est pas à oublier ou occulter : les femmes cumulent contraintes professionnelles et domestiques. Toutes ces hypothèses seront à étudier lorsque la cohorte Cohorte sera totalement constituée. Nous pourrons alors reposer nos analyses sur une population active estimée à 130 000 personnes » conclût l’expert pour qui les statistiques officielles masquent une « épidémie silencieuse » : certains travailleurs préfèrent cacher leurs souffrances par crainte de perdre leur emploi. Constances permet de leur donner la parole. Incognito.

Troubles musculo-squelettiques,
une "épidémie" qui a explosé en 20 ans
En 2014, 87 % des maladies professionnelles prises en charge par l'Assurance maladie sont des troubles musculo-squelettiques. En 20 ans, leur nombre a été multiplié par 8 ! La grande distribution est le secteur du régime général qui en enregistre le plus grand nombre.
Pour Yves Roquelaure, il est temps de changer avant tout l'organisation du travail. « L'augmentation du nombre de troubles musculo-squelettiques depuis les années 80-90 en France, mais aussi dans de nombreux pays se calque sur celle de la diffusion dans les entreprises de nouvelles formes de gestion et de rationalisation de la production du travail conduisant à une intensification. En éliminant tous les temps réputés improductifs, elles densifient et intensifient les contraintes biomécaniques, temporelles et psychosociales : le travail devient plus exigeant et difficile alors que les critères de pénibilité traditionnelles comme le port de charges lourdes tendent à s'estomper. L'avancée en âge de la population active et le recul de l'âge de la retraite vont probablement exacerber cette épidémie. Les entreprises doivent intégrer cela. Car si les troubles musculo-squelettiques nuisent à la qualité de vie des personnes atteintes, elles ont aussi des coûts très élevés pour les entreprises : baisse de la productivité et de la qualité, absentéisme, reclassement des victimes… Améliorer les conditions de travail est aussi un enjeu d’efficience pour les entreprises. »