Stress au travail : la position sociale joue-t-elle sur le risque de maladies cardiovasculaires ?
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Le stress au travail a les mêmes impacts négatifs sur la survenue de maladies cardiovasculaires chez les volontaires de Constances quelle que soit leur position sociale. Mais les employés et ouvriers sont plus exposés au stress au travail que les cadres. Basés sur les données de près de 50 000 participants de la cohorte, ces résultats sont publiés le 27 juin 2023 dans Occupational and Environmental Medicine.
Le stress au travail est un facteur de risque connu de maladies cardio-vasculaires. Il est particulièrement important pour les personnes avec un faible niveau socio-économique. Ce sur-risque est-il lié à un stress au travail plus grand ? Ou bien est-il la conséquence d’un effet démultiplicateur de la position sociale ? Plusieurs mécanismes généraux pourraient expliquer un tel effet : désavantages de santé précoces (« early-life disadvantage »), comportements à risque (tabac, alimentation déséquilibrée…), conditions de travail et de vie plus difficiles.
Pour répondre à ce dilemme, une équipe de chercheurs franco-allemande a analysé les données de 48 383 volontaires de Constances qui étaient salariés à leur inclusion entre 2012 et 2020. Le niveau de stress au travail a été estimé par leurs réponses au questionnaire « mode de vie et santé » et le modèle effort-récompense de Siegrist (voir encadré ci-dessous). Les questionnaires de suivi annuel ont permis de déterminer la survenue, ou non, de maladies cardiovasculaires : infarctus du myocarde, hypertension, arythmie cardiaque, accident vasculaire cérébral (AVC)… La position socio-économique a été approchée par le niveau d’éducation, la catégorie socio-professionnelle et le niveau de revenus, en prenant en compte la situation du conjoint/partenaire le cas échéant.
Le modèle effort-récompense de Siegrist
Développé à la fin des années 80, le modèle de Siegrist (du nom de son auteur, Johannes Siegrist, professeur de sociologie médicale) définit l’existence d’un stress au travail lorsqu’il y a un déséquilibre entre les efforts fournis et les récompenses reçues/perçues. Les récompenses sont déterminées sur 4 axes : (1) les gains monétaires ou reconnaissance matérielle, (2) le degré de contrôle de son statut professionnel (perspectives de promotion et la sécurité de l’emploi),(3) l’estime reçue de la part des collègues et des supérieurs hiérarchiques, (4) l’estime de soi. Les réponses des volontaires à 10 questions bien précises, et standardisées, du questionnaire « mode de vie et santé » ont permis d’évaluer différents niveaux de stress au travail. Dans la présente étude, 3 niveaux de stress ont été étudiés : faible, moyen et haut. Utile pour les recherches, le modèle de Siegrist est aussi puissant pour comprendre et agir au niveau organisationnel, managérial et individuel.
Gradient social de l’exposition au stress au travail
Les volontaires avec un faible niveau d’éducation sont davantage confrontés à un important stress au travail que les volontaires avec un fort niveau d’éducation. Ainsi, 42 % des volontaires avec un faible niveau d’éducation sont confrontés à un déficit de récompense au travail contre 28 % des volontaires avec un fort niveau d’éducation. Ces résultats se retrouvent en considérant le niveau de revenus et la catégorie socio-professionnelle.
Gradient social de survenue de maladie cardiovasculaire
Âgés en moyenne de 43 ans, 6 % des volontaires salariés ont eu une maladie cardiovasculaire durant le suivi. Ces survenues sont associées à un niveau de stress important, mais aussi à la position sociale. Les volontaires avec un faible niveau d’éducation, de faibles revenus ou d’une catégorie socio-professionnelle moins favorisée ont un plus fort risque de maladies cardiovasculaires. Les scientifiques ont ainsi retrouvé des résultats connus.
A niveau de stress égal, un même risque cardiovasculaire quelque soit la position sociale
À niveau de stress égal, la position socio-économique ne joue pas dans le risque de survenue de maladies cardiovasculaires chez les travailleurs et travailleuses de Constances. Autrement dit, les conséquences du stress au travail sont les mêmes : qu’on soit ouvrier ou cadre supérieur, le stress va avoir le même effet. Développer des conditions de travail équilibrées, limiter le stress au travail dans les entreprises, apparaît donc vital pour l’ensemble des catégories socio-professionnelles. « Mais il est important de se souvenir du premier résultat, à savoir que la prévalence et le niveau de stress au travail est plus grande chez les ouvriers que chez les cadres » conclut Morten Wahrendorf, chercheur à l’université Heinrich-Heine de Düsseldorf, qui a coordonné l’étude.
Référence bibliographique :
J. Siegrist, M. Goldberg, M. Zins & M. Wahrendorf. Social inequalities, stressful work and non-fatal cardiovascular disease: follow-up findings from the CONSTANCES Study. Occup Environ Med (2023). DOI: 10.1136/oemed-2022-108794.