La physiopathologie de la survenue de troubles cognitifs et de maladie d’Alzheimer est complexe car multifactorielle (e.g facteurs génétiques, métaboliques, et nutritionnels). Les facteurs nutritionnels ont une action sur la cognition tout au long de la vie et sont potentiellement modifiables ; leur identification est donc essentielle pour élaborer des stratégies de prévention efficaces et ciblées. Dans ce cadre, nous nous intéressons à la consommation des sucres (i.e. sucres simples et amidons raffinés à charge glycémique élevée) qui est croissante dans nos sociétés occidentales, mais très récente à l’échelle de l’histoire de l’humanité. Cette consommation pourrait contribuer à une dérégulation plus rapide du système de réponse à l’insuline. Des études animales récentes suggèrent qu’une consommation élevée des sucres est associée à l’altération de la cognition, indépendamment des perturbations métaboliques périphériques (eg diabète). Chez l’homme, des effets délétères à court terme de la prise des sucres sur la cognition ont pu être mis en évidence mais nous avons peu d’informations sur les effets à long terme. Une seule étude épidémiologique américaine, portant uniquement sur l’impact des boissons sucrées, a mis en évidence une relation significative avec la présence d’altérations cognitives. Aucune étude épidémiologique à grande échelle n’a mesuré les liens entre la charge glycémique globale et la cognition en population générale, en analysant aussi une interaction potentielle avec l’âge.
Par ailleurs, les maladies parodontales, d’étiologie multifactorielle, sont aussi le reflet d’une consommation élevée de sucres. Ces pathologies sont associées à des modifications du microbiote buccal et à des phénomènes inflammatoires, dont certains ont été retrouvées dans le cerveau de personnes Alzheimer. Une étude coréenne récente, basée sur des données de l’assurance maladie mais pauvre en facteurs d’ajustement, a mis en évidence un risque augmenté de démence chez les personnes âgées qui avaient perdu des dents. Par ailleurs, cette perte de dents est corrélée en clinique à des altérations cérébrales dans l’hippocampe, le noyau caudé et le lobe temporal. Alors que la cavité buccale est l’une des voies majeures de contamination qui va conduire aux pathologies chroniques, via des facteurs environnementaux incluant la consommation des sucres, aucune étude épidémiologique richement phénotypée, permettant des ajustements appropriés, n’a encore évalué les liens entre les altérations de cette cavité et la survenue de troubles cognitifs. Par ailleurs, les liens concomitants entre consommation de sucres, maladie parodontale et cognition n’ont jamais été évalués de façon concomitante en population générale.