Maladies rhumatismales chroniques et comorbidités

Caractéristiques

Responsable scientifique MA. d’Agostino
Organisme de rattachement AP-HP
Laboratoire / Lieu Hôpital Ambroise Paré, Boulogne-Billancourt
Année de dépôt 2020
Type de projet Données uniquement

Contexte

Les rhumatismes inflammatoires chroniques (comme la polyarthrite rhumatoïde) ont une prévalence élevée, en augmentation progressive, et sont responsables d’incapacités multiples, et sont à l’origine d’un coût économique à l’échelle individuelle et de la société. La polyarthrite rhumatoïde (PR) est caractérisée par une inflammation ostéo-articulaire et systémique à l’origine de lésions articulaires, qui peuvent provoquer un handicap majeur, responsables d’une dégradation de la qualité de vie (QdV) des patients, ainsi que d’une majoration de la morbidité et de la mortalité. En effet, la PR et les autres rhumatismes inflammatoires chroniques sont associés à une augmentation du risque de maladies cardiovasculaires (MCV) et d’autres comorbidités systémiques, qui peuvent affecter fortement la QdV. Parmi ces comorbidités, les MCV représentent la première cause de mortalité chez les patients avec un rhumatisme inflammatoire comme la PR, la spondylarthrite (SpA) ou le rhumatisme psoriasique (RhPsO). C’est pourquoi l’association entre ces pathologies chroniques et les autres comorbidités (notamment les MCV) doivent être précisément étudiés, permettant ainsi une meilleure prise en charge.

L’augmentation de la mortalité liée aux MCV ne parait pas uniquement expliquée par les facteurs de risque standards, mais aussi due à la pathologie articulaire en elle-même. En effet, l’inflammation chronique peut accélérer le processus d’athérosclérose et de ce fait majorer la morbidité CV, et ceci indépendamment de l’utilisation des différents traitements.

Enfin, la prévalence et l’impact sur la QdV, comparé à la population générale, des autres comorbidités comme les infections, les cancers, les pathologies gastro-intestinales chez les patients avec un rhumatisme inflammatoire n’ont pas été suffisamment évalués.

Objectifs

L’objectif principal est d’étudier l’association entre le risque de MCV et les rhumatismes inflammatoires (PR, SpA, RPso) dans la cohorte en population générale Constances. Les objectifs secondaires sont de déterminer quels aspects épidémiologiques de ces pathologies contribuent à la majoration du risque de MCV, et d’évaluer l’association entre ce risque et l’auto-immunité. Nous prévoyons aussi d’évaluer l’impact des autres comorbidités sur la QdV, comparé à la population générale, et enfin d’estimer la prévalence et l’incidence de chacune de ces pathologies (PR, SpA, RhPsO).

Méthodes

Nous utiliserons les données de la cohorte Constances, en incluant les aspects sociodémographiques, les facteurs de risque et MCV, mais aussi les comorbidités et les traitements, et une partie des sérums nécessaires pour les analyses biologiques. La première étape sera de confirmer les diagnostics de rhumatisme inflammatoire. Pour cela, nous nous appuierons sur les données de la cohorte Constances et celles du Système National d’Information Inter-Régimes de l’Assurance Maladie (SNIIRAM). L’administration d’un questionnaire téléphonique spécifiquement dédié à la détection des rhumatismes inflammatoires sera utilisée sur un échantillon de sujets pour valider le processus de confirmation diagnostique.

Nous quantifierons les facteurs rhumatoïdes (FR) et anticorps anti-peptides citrullinés (ACCP) par méthode ELISA. Nous distinguerons ainsi 4 groupes de sujets : les sujets PR séropositifs (FR et/ou ACCP positif), PR séronégatifs, les sujets sans PR séropositifs (FR et/ou ACCP positif), et les sujets sans PR et séronégatifs. Nous utiliserons un modèle de survie de Cox en utilisant l’âge comme axe de temps, et appliquerons ce modèle pour chaque pathologie articulaire (PR, SpA, RhPsO séparément, et pour l’analyse des données biologiques). Etant donné que certains sujets peuvent avoir des comorbidités préexistantes, nous utiliserons un modèle multi-état pour les analyses. Concernant les autres comorbidités, nous étudierons l’incidence de ces comorbidités chez les patients comparée à la population générale, en utilisant un modèle de Cox. Enfin, pour l’estimation de la prévalence et de l’incidence, nous mesurerons ces paramètres dans la cohorte Constances sur la base des diagnostics confirmés de PR, SpA, RhPsO.

Perspectives

L’accès à la cohorte Constances représente une opportunité unique de confirmer la majoration du risque de MCV dans les rhumatismes inflammatoires chroniques, et d’étudier l’ensemble des comorbidités associées à ces pathologies, comparé à la population générale. L’analyse de la biobanque permettrait aussi d’évaluer l’association entre le risque de MCV et l’auto-immunité, en population générale. La découverte d’une association potentielle avec ces auto-anticorps serait aussi particulièrement importante, car ceux-ci pourraient avoir une valeur pronostique et impacter la stratégie de prédiction et prévention CV, pour les patients ainsi que les adultes sans pathologie rhumatologique.

De plus, le but de ce projet est l’établissement d’un score de risque CV spécifiquement adapté à ces patients, en considérant les paramètres associés comme le type de pathologie, sa durée d’évolution, les caractéristiques du patient (âge, genre…), et les traitements. En effet, l’utilisation de scores standards de risque de MCV n’est pas validée car ils ne sont pas appropriés chez les patients avec des rhumatismes inflammatoires. Lors de sa dernière mise à jour, l’EULAR (European League Against Rheumatisms) a recommandé d’adapter les scores de risque pour calculer le risque de MCV chez les patients avec une PR en multipliant par un facteur de 1,5, mais le niveau de preuve reste limité et les modèles d’évaluation prédisent de façon inadaptée le risque de MCV chez ces patients. Pour la SpA et le RhPsO, il n’y a pas de score décrit, soulignant bien la nécessité de recherche pour ces patients.

Enfin, nous prévoyons de déterminer précisément la prévalence et l’incidence de ces trois rhumatismes inflammatoires, le recours à une cohorte en population générale étant la méthode la plus fiable pour estimer ces paramètres.

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