Santé déclarée en fonction du sexe

Caractéristiques

Responsable scientifique E. Caroli
Organisme de rattachement Université Paris-Dauphine
Laboratoire / Lieu Paris
Année de dépôt 2016
Type de projet Données uniquement

Contexte

La littérature dans le domaine du genre et de la santé a depuis longtemps montré ce paradoxe : les femmes rapportent constamment une autoévaluation de leur santé plus mauvaise que les hommes, bien que leur probabilité de décéder est moindre tout au long de la vie. L’existence d’un écart de morbidité selon le genre est débattue depuis les années 1980. 

Objectifs

Ce projet de recherche se propose d’apporter de nouveaux éléments sur les différences de genre quant à l’autoévaluation de la santé et de ses causes grâce à la cohorte Constances. La cohorte comprend non seulement des données d’autoévaluation de la santé, mais aussi de riches informations objectives sur l’état de santé.  Premièrement nous voulons vérifier si la santé des femmes, mesurée par autoévaluation, est moins bonne que celle des hommes, et si cet écart reflète des différences mesurées objectivement. Si l’écart disparaît quand la santé est mesurée objectivement, notre étude sera complémentaire avec les études américaines aboutissant à un résultat similaire. Si, au contraire, notre étude montre que la santé des femmes est moins bonne que celle des hommes, nous chercherons à savoir si cet écart est causé par des pathologies ou douleurs spécifiquement féminines (douleurs menstruelles, pathologies du sein, etc.). Dans un second temps, nous voulons déterminer la contribution des conditions de travail à l’écart de genre dans l’autoévaluation de la santé. En particulier l’emploi des femmes dans des métiers causant des pathologies spécifiques, plus douloureuses que celles engendrées par les métiers des hommes, pourrait expliquer qu’elles évaluent leur santé comme moins bonne que lorsqu’elle est mesurée objectivement. 

Méthodes

Nos analyses reposeront sur les méthodes statistiques économétriques classiques dans les champs de l’épidémiologie et de l’économie de la santé. Dans un premier temps nous chercherons à établir si les femmes se déclarent en moins bonne santé que les hommes au sein de la cohorte Constances. Précisément nous bâtirons un modèle économétrique dans lequel l’autoévaluation de la santé sera considérée comme une fonction des caractéristiques individuelles et du sexe. Si nous mettons en évidence une différence liée au sexe, l’étape suivante sera de déterminer si cette différence existe aussi quand la santé est mesurée de façon plus « objective ». Suivant la méthodologie proposée par Jürges (2007), nous bâtirons un modèle en deux étapes au sein duquel la santé autodéclarée sera tout d’abord considérée comme une fonction des mesures « objectives » de la santé, et prédite par le modèle. Puis la santé autodéclarée sera considérée comme une fonction de sa valeur prédite ainsi que du sexe et des interactions possibles entre les deux. Cela nous permettra de savoir si les femmes se considèrent en moins bonne ou meilleure santé que les hommes en fonction des réelles conditions de santé, et ou bien si le niveau ‘santé autodéclarée’ est semblable mais que le gradient varie selon le sexe. Dans un troisième temps nous essayerons de comprendre si la différence résiduelle entre les genres de l’autoévaluation de la santé peut être imputée aux problèmes de santé spécifiques aux femmes. En particulier nous construirons une variable synthétique de la santé féminine grâce aux données sur les douleurs menstruelles, ou liées à ce cycle, ainsi que des douleurs mammaires, en interaction avec une variable fictive de genre. Cela nous permettra d’évaluer si l’écart de genre dans l’autoévaluation de la santé est dû aux femmes souffrant de problèmes de santé spécifiquement féminins. Éventuellement nous considèrerons le rôle des conditions de travail quant aux différences résiduelles d’autoévaluation de la santé chez les salariés, conditionnées sur la santé mesurée « objectivement », et les douleurs et affections spécifiquement féminines. En utilisant les très riches données sur les conditions de travail disponibles dans la cohorte Constances, nous construirons plusieurs indicateurs en interaction avec une variable de genre pour mettre en évidence d’éventuels aspects de l’autoévaluation de la santé associés aux conditions de travail des femmes qui travaillent. 

Perspectives

Globalement, nos analyses devraient contribuer à dresser un tableau général des différences de genre quant à l’état de santé, dans leurs dimensions objectives et subjectives. Ces résultats contribueront au vif débat sur les causes de ces différences d’autoévaluation de la santé, qu’elles soient dues ou non à la santé mesurée objectivement, ou aux conditions de travail. Si les différences résiduelles de genre quant à l’autoévaluation de la santé étaient mises en évidence, cela mènerait à un nouveau programme de recherches sur l’influence du genre sur l’appréhension de la santé, et possiblement sur le rôle des normes sociales dans la construction de cette appréhension. 

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