Recherche et études

Contexte

La France se distingue comme l’un des pays européens affichant les prévalences de consommation de cannabis les plus élevées. Entre 1992 et 2017, les niveaux d’usage de cannabis chez les adultes ont connu une progression continue. Si la consommation au cours de l’année ainsi que l’usage régulier parmi les 18-64 ans se sont stabilisés à partir de 2017, atteignant respectivement 10,8 % et 3,4 % en 2023, l’expérimentation du cannabis quant à elle, n’a cessé d’augmenter, passant de 12,7 % en 1997 à 50,4 % en 2023. Par ailleurs, la consommation de cannabis varie selon le niveau socioéconomique des individus. Les usages réguliers et problématiques sont en effet plus fréquemment observés chez des personnes ayant un niveau de diplôme et une position sociale moins élevés. Des disparités territoriales ont également été mises en évidence : les départements d’Outre-mer comptent un nombre moindre d’usagers, mais présentent des consommations plus fréquentes, tandis que certaines régions du sud de la France dépassent la moyenne nationale. Les facteurs associés à la consommation de cannabis semblent avoir évolué au fil du temps, comme en témoigne la proportion croissante de femmes ayant expérimenté le cannabis, la baisse de la consommation parmi les jeunes générations, ainsi que la persistance d’un usage régulier au-delà de 30 ans. En plus des déterminants socioéconomiques, de nombreux facteurs, intra- et interpersonnels paraissent associés à cette consommation, notamment des troubles de santé mentale, des événements de vie traumatiques survenus durant l’enfance, ou encore des dysfonctionnements familiaux, etc.

Si la dynamique de consommation de cannabis en lien avec certains facteurs sociodémographiques est bien documentée dans d’autres pays, notamment aux États-Unis, où le cannabis est légalisé dans plusieurs Etats, elle demeure encore peu étudiée en France. En outre, peu d’études ont analysé l’évolution dans le temps des facteurs intra- et interpersonnels associés à cette consommation, en particulier les traumatismes et les violences subies.

Nous formulons l’hypothèse que les facteurs associés à l’usage de cannabis en France ont évolué au cours du temps, sous l’effet des politiques publiques, mais également en fonction de l’âge, du genre, du statut socio-économique et des caractéristiques socio-territoriales des lieux de résidence. Ces évolutions pourraient entraîner une transformation du gradient social des consommateurs de cannabis à travers les générations, avec risque de creusement des inégalités sociales, comme cela a été observé pour le tabac.

Objectifs

Ce projet vise à caractériser, dans une perspective temporelle, les dynamiques de consommation de cannabis en fonction des divers déterminants associés à cet usage. Il s’agira également d’examiner l’évolution des disparités socioéconomiques et territoriales, afin de déterminer si les inégalités sociales en matière de consommation de cannabis se sont accentuées ou, au contraire, atténuées au fil du temps.

Méthodes

Les participants seront sélectionnés selon les critères d’inclusion suivants : avoir participé à au moins une vague de l’étude Constances entre 2012 et 2022, et avoir renseigné leur consommation de cannabis à au moins une vague. Compte-tenu de la dimension longitudinale du projet, l’objectif est d’inclure le plus grand nombre possible de participants ayant répondu à plusieurs vagues de l’étude. La consommation de cannabis au cours des 12 derniers mois constituera la variable principale d’intérêt. Les facteurs associés incluront des indicateurs socioéconomiques aux niveaux individuel et territorial, des variables démographiques, des facteurs de risque reconnus liés à l’usage de cannabis, ainsi que des variables relatives aux événements de vie.

Perspectives

Cette étude apportera une contribution significative à la compréhension des inégalités sociales liées à la consommation de cannabis en France, où cette substance demeure illégale. Les résultats pourront orienter les politiques publiques en vue de réduire ces inégalités et de prévenir les usages problématiques par des actions plus ciblées et adaptées.