Cancers féminins, des dépistages et des inégalités

Depuis 2004, le dépistage du cancer du sein est généralisé en France. Son recours n’en demeure pas moins marqué d’inégalités sociales. Il en est de même pour le cancer du col de l’utérus selon une étude menée sur la cohorte Constances.

Avec 12 000 décès en 2015, le cancer du sein se situe en tête de la mortalité par cancer chez les femmes en France. Ce taux de mortalité diminue toutefois depuis près de 20 ans grâce à l’amélioration des traitements et un meilleur dépistage qui permet de diagnostiquer les cancers à un stade plus précoce. Depuis 2004, en parallèle du dépistage individuel, un dépistage généralisé est proposé, tous les 2 ans, aux femmes de 50 à 74 ans. Y ont-elles toutes recours quelle que soit leur situation sociale ? Qu’en est-il pour le cancer du col de l’utérus dont les frottis sont préconisés tous les 3 ans pour les femmes entre 25 et 64 ans ?

Une équipe de l’Institut Pierre Louis d’épidémiologie et de santé publique (Inserm-UPMC) emmenée par Gwenn Menvielle s’est penchée sur ces questions à partir d’une extraction de données de la cohorte Constances de 2014 comportant 10 260 femmes de 50 à 74 ans et 18 761 femmes de 25 à 64 ans. Ces données ont été associées à celles de l’assurance maladie afin de connaître le recours, ou non, au dépistage du cancer du sein et du col de l’utérus.

Un recours au dépistage fonction des revenus du foyer

D’importantes inégalités sociales sont apparues pour le recours au dépistage de ces 2 cancers féminins. Seules 70 % des les femmes vivant dans un foyer avec un revenu inférieur à 1 000 € / mois ont réalisé une mammographie au cours des 2 dernières années contre plus de 80 % des femmes avec un revenu supérieur à 1 500 € / mois. « Ces inégalités sont encore plus marquées pour le dépistage du cancer du col de l’utérus, en raison sans doute des frais causés par la visite médicale au cours de laquelle a lieu le prélèvement : avance des frais et possible reste à charge » indique Gwenn Menvielle.

Un suivi gynécologique crucial

Grâce aux données de Constances, les chercheurs ont recherché les facteurs se cachant au-delà de ces revenus pour expliquer le recours au dépistage. « Pour le cancer du sein, 50 % des différences de recours à la mammographie observées entre les différents niveaux de revenus sont associées à l’existence ou non d’un suivi gynécologique par un gynécologue. Pour le cancer du col de l’utérus, ce pourcentage atteint de 55 %. Ces résultats montrent l’importance du suivi gynécologique dans la réalisation des dépistages y compris pour le cancer du sein alors que, dans le cadre du dépistage organisé, les femmes reçoivent une invitation personnelle à domicile pour réaliser la mammographie » souligne l’épidémiologiste. Et d’ajouter : « Le suivi gynécologique ne doit pas s’envisager seulement via des gynécologues : il peut se faire par des sages-femmes. Elles le font de plus en plus depuis la loi du 21 juillet 2009. Il faut continuer et amplifier cette tendance et former les sages-femmes à ces examens. Cela améliorerait notamment la pratique du dépistage du cancer du col de l’utérus dans l’ensemble de la population, et en particulier parmi les femmes les plus défavorisées ».

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